Les cinq stades juvéniles, comme chez tous les Hétéroptères, ne diffèrent pas profondément du stade adulte et la croissance après l’éclosion ne comporte pas de métamorphoses, procèdant seulement par des mues ou ecdysis dont la dernière, dite mue imaginale, s’accompagne de quelques achèvements structuraux, notamment le complet développement des organes sexuels. Le nombre normal de stades nymphaux est de cinq (fig. 44).
Outre leur taille évidemment plus petite, les juvéniles offrent, par rapport aux adultes, un certain nombre de différences dans la morphologie, les proportions, la coloration ou la sclérification tégumentaire.
Caractères morphologiques généraux des juvéniles
Tous les juvéniles du stade I au stade V possèdent trois glandes odorifères dorso-abdominales, dont les réservoirs, plus ou moins circulaires, apparaissent nettement en rouge par transparence aux premiers stades.
Ces réservoirs débouchent par deux orifices postérieurs sur les membranes inter-segmentaires III-IV, IV-V, V-VI.
Les yeux sont très sommaires au premier stade juvénile et parfois aussi pour le jeune de stade II (fig. 40) ; le nombre des ommatidies ne paraît toutefois jamais inférieur à cinq ; il s’accroît aux stades suivants pour devenir en fin de développement comparable à celui des adultes.
Les juvéniles sont toujours dépourvus d’ocelles comme les adultes.
Les plaques hémélytrales des Cimicidés ne sont présentes que chez les adultes.
Les tarses ne montrent, à tous les stades juvéniles, que deux articles (contre trois pour les adultes).
Les organes sexuels sont extérieurement invisibles sauf au stade V où l’ovipositeur de la femelle est déjà ébauché.
Figure 40 : Différents stades juvéniles de Cimex lectularius (Marlatt, 1916).
a : premier stade recouvert avec une partie de la mue (exuvie), noter les trois glandes abdominales odorifères ; b : second stade juvénile immédiatement après la mue ; c : deuxième stade juvénile après un premier repas, distension abdominale due au sang. Taille réelle indiquée par la lettre I à droite des figures. Les proportions relatives du rostre, des antennes et des pattes se modifient du premier stade au dernier.
Evolutions morphologiques au cours de la croissance
Les antennes du premier stade juvénile sont épaisses, avec une hypertrophie marquée du 4ème article et un faible développement des 2ème et 3ème ; le 4ème article est souvent rouge vif et le reste incolore ; cette hypertrophie et ce contraste de coloration disparaissent aux stades suivants.
Les pattes des jeunes sont d’autant plus trapues que le stade est plus juvénile ; les tarses des stades I et II sont remarquablement développés ; le rostre est généralement plus épais dans les premiers stades.
La coloration des diverses parties du corps est sujette à des modifications ; presque incolores à l’exception des yeux, du dernier article antennaire et des réservoirs odorifères dorsaux vus par transparence, qui demeurent rouge vif ; la pigmentation de la cuticule apparaît ensuite peu à peu et masque en partie les colorations précédentes qui sont d’origine interne.
Après chaque mue les téguments sont de nouveau presque transparents mais la pigmentation subséquente est de plus en plus profonde (fig. 40 et 41).
Des différences individuelles importantes peuvent apparaître sous l’influence du mode d’alimentation et d’autres facteurs, et la description trop détaillée des couleurs des jeunes est souvent sans utilité.
Les téguments juvéniles sont incomplètement sclérifiés, l’étendue des sclérites s’accroissant progressivement à chaque stade. Les sutures ecdysiales de la tête et du dessus du thorax existent à toutes les étapes du développement. La sclérification abdominale des juvéniles de Cimicidés reste presque nulle sur la face ventrale et sur les deux premiers tergites de la face dorsale.
Figure 41 : Exuvies de jeunes de stade V retrouvées près d’un refuge de punaises de lit (Kim, 2013).
La nourriture des jeunes ne diffère pas de celle des adultes, il s’agit de sang humain de préférence
Du fait de l’absence quasi complète de sclérification abdominale, les repas des jeunes de Cimicidés peuvent se prolonger jusqu’à entière réplétion de l’abdomen, qui prend une forme sphérique.
Chez les Cimex, l’accroissement de poids après digestion d’un seul repas peut atteindre 30 à 40 % du poids de sang absorbé. Un repas de sang au moins est nécessaire entre deux mues (Péricart, 1972).
La durée totale des stades nymphaux varie suivant les genres et espèces et elle dépend de divers paramètres : température, humidité, régime d’alimentation.
Modalité de la mue
Dans le cas de Cimex lectularius, le jeune se fixe fortement au support et provoque, par pression du contenu de son tube digestif et de l’air aspiré à cet effet, une rupture de la suture ecdysiale thoracique jusqu’au premier tergite abdominal ; l’insecte se dégage alors de l’exuvie en commençant par le thorax, puis suivent l’abdomen, la tête, et enfin les appendices ; la mue dure seulement quelques minutes si la température et l’humidité sont convenables.
